dimanche 22 septembre 2013

Double crime dans la rue Bleue de Jean Contrucci

Accroche :
Un jeune et intrépide reporter nous entraine dans d'intrigantes enquêtes dans un Marseille de la belle époque, haute en couleurs, avec des personnages truculents à souhaits et déjouant de main de maître des énigmes, accompagné de sa fidèle épouse et de son oncle, chef de la sureté marseillaise.

Mon avis :
Avant toute considération policière, les romans de Jean Contrucci nous transportent dans un Marseille de ce début de siècle qui a vu tant de transformations et de progrès dans la société. Plonger dans la mémoire d'une ville formidable où les immigrants de tous les pays viennent chercher une vie meilleure. La misère sera bien souvent au rendez-vous, les ouvriers étant aussi mal traités dans cet illusoire pays de cocagne, mais les populations, ainsi asservies, resteront définitivement dans cette ville et leurs descendances formeront les nouveaux Marseillais pour le meilleur et pour le pire. Ville d'éternels mouvements qui voit fleurir l'idéal social d'une société en pleine mutation, Marseille brasse ses populations de miséreux, échoués sur les rives du Lacydon formant des strates d'un peuple lié par l'amour de cette terre désirée. Car c'est cela Marseille, une terre promise pour ceux qui espèrent une vie meilleure. La misère épouvantable jette les êtres humains loin de chez eux et les oblige à se vendre à un patronat de plus en plus riche, peu soucieux du sort de ces milliers d'ouvriers dont la vie ne vaut pas cher face à l’appât du gain.
J'ai choisi, parmi la dizaine de romans dont Raoul Signoret est le héros, de vous parler de Double crime dans la rue bleue car l'action se déroule à la Belle de Mai, quartier cher à mon cœur, car j'y ai passé mon enfance et qui est le berceau de ma famille. En lisant ce roman, une douce nostalgie m'a envahie, car c'est l'histoire d'une famille que j'adore. Immigrants toscans, partis d'un pays où la misère poussait des familles entières à trouver du travail. Les babis, comme les surnommaient les Marseillais, étaient aussi mal considérés que les immigrants d'Afrique du nord de nos jours.
Les ouvrières de la manufacture de tabac, appelées les cigarières, formeront les personnages de ce roman policier. La rencontre de ces femmes courageuses dont la tâche use leur vie jusqu'à la trame va bouleverser notre héros. Aidé de son épouse, la séduisante Cécile, le jeune reporter au Petit Provençal, va élucider le mystère qui plane après la découverte d'un corps sans tête. C'est également l'occasion de faire la découverte d'un personnage attachant, le chef de la sureté Eugène Baruteau, vouant un amour inconditionnel à ce neveu qu'il considère comme un fils. C'est aussi assister aux repas dominical où la famille se réunit dans la joie et la bonne humeur et saliver devant les recettes provençales concocter par Thérèse, la tante de Raoul. C'est toute mon enfance qui ressurgit à la lecture de ces lignes, car elles me rappellent les bons plats que me faisait ma grand mère. La langue employée par les protagonistes, langage populaire qui mêle le français à l'italien ponctué de provençal, me ramène trente ans en arrière au temps d'une enfance choyée par des êtres merveilleux.
C'est tout ce bonheur simple que je retrouve dans ces ouvrages, écrits avec tendresse par Jean Contrucci. L'auteur aime Marseille et ses personnages et cela fait du bien.
Car Marseille est une ville profondément attachante malgré ses défauts innombrables. Les pauvres arrivés par masse des quatre coins de la terre vont la changer, la transformer siècle après siècle, lui donnant, tour à tour, un visage différent. Mais l'amour pour cette terre promise, va également unifier ces étrangers qui finiront par devenir des Marseillais.
Cela n'a pas vraiment changé cent ans après. La ville reste la belle insoumise, refuge des miséreux. Les romans de Contrucci nous parle toujours, car les ouvriers dont le sort s'est amélioré heureusement restent, malgré le progrès, aussi mal payés et les riches, toujours aussi riches.

Enfin, et c'est cela l'important dans les romans de Contrucci, le personnage principal reste Marseille, cette belle provençale, au grand cœur qui continue à accueillir en son sein, ces populations toujours plus nombreuses. Rendons hommage à ces babis qui ont donné leur vie à la France et dont un Marseillais sur quatre est issu. Marseille, la généreuse, les gardera dans sa mémoire pour toujours et à jamais.

Quoi lire après...
Un ouvrage de Contrucci, faisant tous partie d'un cycle dont Raoul est le héros.

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